Dossier d’œuvre architecture IA66003449 | Réalisé par
  • pré-inventaire
Présentation de la commune de Finestret
Œuvre étudiée
Copyright
  • (c) Communauté de communes Conflent Canigó
  • (c) Inventaire général Région Occitanie

Dossier non géolocalisé

Localisation
  • Aire d'étude et canton Conflent-Canigou
  • Commune Finestret

Une occupation antique

Trois sites majeurs sur le territoire de Finestret présentent des vestiges découverts dans les années 1980, de sites métallurgiques qui remontent à l’occupation romaine. Le hameau de Sahilla situé à 700 m d’altitude en direction de Baillestavy est constitué de maisons construites sur d’anciennes scories de fer romaines. Par ailleurs, des éléments de sigillée gauloise avec motif végétal datés des 1er et 2e siècle après J.-C. furent mises au jour. A 200 m de Sahilla, des scories ainsi que de fragments d’amphore furent découverts dans le crassier du « camp del Caraller » par Georges Taurinyà et Rémi Marichal en 1982. Le site de l’Alguer, développé sur la rive gauche de la Lentillà, a révélé des traces d’occupation du 1e siècle après J.-C., avec des scories identifiées par Gérard Mut. De plus, des tombes aménagées en lloses furent mise au jour dans une vigne appartenant à un ancien habitant de Finestret. En bordure de la vigne, Les restes d’un pilier de 1,50 m de haut ont également été découverts. Selon les sources, il pourrait s’agir d’un ancien oratoire dédié à Saint-Gaudérique ou des vestiges de la chapelle Saint-Félix.

Finestret du 10e au 16e siècle

Finestret du 10e au 16e siècle Le village de Finestret est cité pour la première fois dans un acte de donation d’un alleu en 901 sous le terme « Fenestrum » [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.9], par un certain Lodoi et sa femme Arsenda à leurs fils. D’autres alleu de Finestret sont légués au Xe siècle, comme en 915 par l’évêque Riculf à l’église d’Elne, en 965 à l’abbaye d’Arles par le comte de Cerdagne-Conflent Sunifred et en 978, 1009 et 1031 à l’abbaye de Saint-Michel de Cuxa. Le hameau de Sahillà compris dans le territoire de Finestret, et occupé depuis l’époque antique (voir la partie consacrée au cadre naturel), est évoqué pour la première fois en 1011 sous la forme « Erzillanum », faisant référence à la présence d’un ancien domaine romain. C’est en 1033 [CAZES, 1977, p. 39] que l’église de Finestret dédiée à Sainte Colombe (Santa Coloma en catalan) est mentionnée, dans un acte de donation d’un alleu à l’abbaye de Saint-Michel-de-Cuxa. Du XIIe au XIIIe siècle, la seigneurie de Finestret appartient à la famille d’Urg, alors détentrice de celle de la commune voisine de Joch. Le canal d’arrosage le Rec Major raccordé à la rivière de la Lentilla est construit au XIIIe siècle par l’accord d’Arnau de Cortsavi, mari de Gueralda d’Urg, petite fille du seigneur d’Illa Galceran d’Urg, afin de fournir en eau les villages de Finestret, Joch, Rigarda, Sahorla et Vinça. Les frais d’entretien du canal devaient être « à la charge des tenanciers des quatre terroirs » [JAUBERT DE PASSA, 1821, p. 106] et l’entretien des rigoles par les communes elles-mêmes. La famille de Perellos détient Finestret au XIVe siècle, dont Ramon de Perellos, qui bénéficie de droits sur les terres entre 1356 et 1357. En 1369[CAZES, 1975, p. 39], une seconde église cette fois dédiée à Saint-Félix est mentionnée au lieu-dit La Clota, situé à l’Ouest de Finestret. Aujourd’hui disparue, l’église a donné son nom son nom au col de Saint-Félix, localisé sur son ancien emplacement. Le recensement de population de 1330 à Finestret [PONSICH, Geografia comarcal de Catalunya, vol. 14, pp 152-154] fait état de 26 "fogatges" (feux en catalan), ce qui correspond à environ 120 habitants. Les nombreuses épidémies telle que la peste entrainèrent par la suite une importante baisse démographique, avec 11 feux recensés en 1378. Au XVe siècle, la présence de 21 feux confirme une augmentation de la population, liée à l’arrivée de familles aisées à Finestret. Certaines sont mentionnées dans un capbreu de 1466 conservé aux Archives Départementales des Pyrénées-Orientales, notamment la famille Morer qui fut la plus riche du village durant plusieurs siècles. Le capbreu indique les biens de la famille, dont 37 parcelles en emphytéose détenues par Joan Morer, consul de Finestret en 1436 [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.9]. Bernat-Béranger de Perapertusa hérite par sa tante Eleonora de Perellos de la seigneurie de Finestret dès 1459, alors comprise dans la « Baronnie » de Joch . Le nom de « Baronnie » désigne ici un regroupement des villages de Rigarda, Joch, Finestret, Glorianes, Rodès, Sahorla et Rabouillet, comme l’illustre Albert Cazes dans la revue Conflent . Bernat-Béranger obtient au XVe siècle le titre de vicomte par le roi d’Espagne, lui permettant de jouir pleinement de la richesse du territoire. L’autorité de la famille de Perapertusa concerna surtout les différentes justices comme le prélèvement de la dîme, jusqu’à la révolution française. L’absence de fortification dans Finestret amène les habitants du village à se rendre régulièrement à Joch, afin de bénéficier de la protection du château. En 1466 , l’oratoire El Volo dédié à Sainte-Anne est mentionné sur l’emplacement de la maison « Touron », au niveau du lieu-dit El Christ, proche du cimetière du village.

Finestret du 17e au 18e siècle

Au 17e siècle, des demeures bourgeoises sont construites à Finestret, comme celle de la famille Morer en 1628 (dossier IA66003416) sur la place Sainte-Colombe. Une liste de la population dressée par les consuls de Finestret en 1766 [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.14], recense 85 chefs de famille ainsi que 117 maisons, correspondant à une population comprise entre 340 et 400 habitants. Quelques familles très aisées (notamment la famille Morer) sont mentionnées dans un inventaire des biens-fonds de 1775 , au côté d’une majorité de familles modestes. La présence de ces riches familles permet à Finestret de jouir d’une position importante au sein de la « Baronnie » et de se distinguer à travers l’architecture domestique, malgré la pauvreté de beaucoup d’habitants. En effet, selon un état de la situation économique de la population dressé en 1790, plus de 126 habitants ont de très faibles revenus. L’augmentation de la population continue à la fin du XVIIIe siècle, avec 491 habitants en 1799.Un second canal portant le nom de Rec del Molí fut conçu dans les années 1770 par Jacques Morer, afin d’irriguer les terrains situés en rive gauche de la Llentillà et d’alimenter en eau un moulin à farine et un moulin à huile, dont les dates de construction ne sont pas connues. Le canal était alors raccordé à la rivière de la Lentillà depuis Valmanya, comme le canal du Rec Major. Il fut construit à même la roche, notamment dans le granit. A cette époque, de nombreux épisodes d’inondations ont frappé Finestret, la plus importante étant celle d’octobre 1763. Les moulins furent emportés, laissant un temps les habitants du village sans moulin. Le comte d’Aranda, descendant des Perapertusa, jugea inutile de les reconstruire, préférant utiliser ceux de Joch. Malgré cette réticence, un moulin à farine fut construit en 1775 par deux maçons, Michel Amiel de Vinça et Joseph Prim de Baillestavy [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.18]. D’autres travaux ont été effectués au 18e siècle, notamment pour l’église de Sainte-Colombe de Finestret, avec l’ajout du portail occidental en marbre rose de Villefranche-de-Conflent.

Finestret du 19e siècle à nos jours

Le rapprochement entre les municipalités de Joch et de Finestret est pensé au 19e siècle, afin de permettre à l’église de Finestret de jouir de la richesse du chef-lieu de la Baronnie. Pourtant, les tensions entre les deux villages n’ont cessé d’être présentes, et le rôle ecclésiastique de Joch a longtemps été critiqué, notamment pour le manque d’entretien de sa chapelle seigneuriale. Finestret jouissait d’une position importante malgré l’absence de pouvoir central, grâce à son église qui, selon un document communal de 1826, « fut pendant neuf cent ans le chef-lieu de la division ecclésiastique des terroirs environnants » [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.26].Toujours en 1826, il est question de construire le nouveau cimetière au lieu-dit La Falgouse, dans un champ appartenant à François Noell, maire de Finestret de 1848 à 1850. En effet, le cimetière était jusqu’à présent situé autour de l’église, au Nord et à l’Ouest de celle-ci. Le cadastre de 1831 permet d’identifier son ancien emplacement, actuellement remplacé par la place Sainte-Colombe.Le cimetière sera finalement construit en 1857 sur une partie de terrain appartenant à Jaubert de Passa, au lieu-dit El Volo, près de l’oratoire dédié à Sainte-Anne, ainsi que sur celui de Joseph Morer. Une lettre écrite par Jaubert de Passa au sujet de l’oratoire vers les années 1850 explique que l’aïeul de sa femme, François Morer, « s’en était réservé la propriété, l’entretien, et en prêtait la clef aux marguilliers les jours de grande fête ». Il indique également que sous la révolution, la chapelle fut totalement ruinée. L’oratoire fut démoli par Jaubert de Passa lui-même, pour la construction d’une remise à voitures [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.38].Le plan cadastral de 1831 permet de retrouver son ancien positionnement à l’entrée Nord de Finestret, sur l’actuelle propriété du n°4 Chemin du Christ. Si la démolition de l’oratoire est mentionnée dans les sources, une nouvelle structure abrite actuellement la représentation de Sainte-Anne dans le soubassement de la propriété privée. Le nouvel oratoire fut réalisé en 2010, en même temps que celui dédié à Saint-Gaudérique.Afin de traverser la rivière de la Lentillà en entrée de ville Ouest, la construction d’un premier pont est décidée en 1813. En partie emporté par une crue de 1814, il est reconstruit en 1817 et s’effondre de nouveau en 1820. Le pont actuel a probablement été édifié au 20e siècle et a su résister aux importantes crues du siècle comme celle de 1940.Non loin de ce pont, la municipalité de Finestret décida d’acquérir en 1870 la maison « Mas » [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p.33], pour y aménager l’école. Les travaux furent réalisés par Jean Rigot en 1874. La maison « Planeilles » alors située en face de l’école a été démolie en 1903, pour permettre aux salles de classe de bénéficier de plus de lumière naturelle. Le bâtiment accueille désormais la mairie de Finestret depuis les années 1990.En 1841, Finestret comptait 654 habitants en 1841 [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLE, 1990, p. 33]. L’exode rural amorcé dans la seconde moitié du 19e siècle entraine une importante baisse démographique tout au long du 20e siècle, avec 403 habitants en 1901, 330 en 1926, 227 en 1962, et 124 en 1990.

  • Période(s)
    • Principale : Antiquité
    • Principale : Moyen Age
    • Principale : Temps modernes
    • Principale : Epoque contemporaine

LE CADRE NATUREL

Paysage et activité économique

Le territoire communal de Finestret s’étend sur 843 hectares, dont une grande partie de sa surface recouvre les versants montagnards de la vallée de la Lentillà. Il est délimité à l’Ouest par Espira-de-Conflent, à l’Est par la commune de Joch, au Sud par Baillestavy et au Nord par Vinça. Les pics de Marbet à l’ouest et de les Feixes à l’est marquent les limites communales. L’analyse toponymique de Finestret permet d’établir un rapprochement avec sa situation géographique. En effet, le terme latin « Finestra » signifiant fenêtre, traduit par métaphore un passage, un accès [Toponyme historique de Catalunya Nord, Numéro 73 à 80, Prades, 1990, p 469]. Le village est effectivement situé à l’entrée de la vallée de la Lentillà et permet d’accéder aux villages de Baillestavy et de Valmanya. La rivière de la Lentillà est par ailleurs resserrée juste avant d’arriver au village. Plusieurs noms ont traversé les époques pour désigner le village, tels que « Fenestrum » au Xe siècle, « Fenestred » entre le XIe et le XIIIe et enfin Finestret au XIVe siècle. A la limite entre Finestret et Vinça s’est développée la Garrigue, terrasse alluviale du bassin de la Têt constituée d’une accumulation de galets de rivières. Des espaces de culture pour la vigne et l’olivier ont pu être aménagés sur cet épandage, avec le dégagement des galets pour la construction de murs en pierre sèches, appelés tarters [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLÉ, Revue d’Ille et d’Ailleurs, juillet 1990, p 7]. Ces espaces sont constitués de murets de séparation entre les différents terrains agricoles, comme l’atteste ceux présents tout le long du Chemin de la Garrigue, qui permet de relier le village de Sahorle à Finestret. La construction de ce type d’ouvrage est réalisée à partir de la roche directement disponible sur site. Sur le territoire de Finestret, les murets ont été construits en granit, roche résistante qui permet de leur donne une bonne stabilité. Afin de s’abriter et d’entreposer le matériel agricole, quelques abris aménagés en granit sont visibles sur le Chemin de la Garrigue. Ceux repérés lors de l’enquête de terrain sont de deux types ; l’abri peut directement être intégré dans le muret ou isolé au côté d’un tas d’épierrages. Ces abris sont voûtés en encorbellement avec des pierres formant un plan circulaire, dont leur superposition permet de donner un équilibre à l’ensemble. Leur linteau est horizontal et composé d’une pierre plate de schiste. Situés en dehors du village de Finestret, les constructions en pierres sèches témoignent d’un savoir-faire ancien, même si la plupart d’entre elles datent principalement des XVIIIe et XIXe siècle [Pierre sèche des Pyrénées Catalanes, Découvrir et bâtir, Cahier pratique du Parc, Mai 2004, p 13]. . Finestret est implanté sur la rive droite de la Lentillà, à 312 m d’altitude dans les basses terres, où se concentrent les principaux terrains agricoles comme les pêchers. L’inventaire des biens-fonds de 1775 mentionné plus haut donne un état des lieux des cultures les plus répandues durant cette période. Les terres pour le blé représentent le plus de superficie, avec 115 hectares. La vigne est également bien développée avec 57 hectares, et 37 hectares pour les bois et les pâturages. Le seigle représente quant à lui 12 hectares et la superficie des prés 9 hectares. La vigne est cultivée jusqu’au XIXe siècle, où elle disparait presque totalement à cause de la crise du phylloxéra. Sa disparition est compensée par les cultures de la pomme de terre et du maïs. Les hauteurs de Finestret sont constituées de terrasses de vignes, au niveau du Coll de Sant Feliu.Le long de la vigne (qui appartenait à l’hospice) illustrée sur la photographie ci-dessus, se trouve l’oratoire de Saint-Gaudérique qui fut restauré en 2010. A proximité de cet oratoire fut découvert les restes de tombes humaines évoqué plus haut, dans une vigne au lieu-dit L’Alguer, appartenant à la famille Sabaté. Actuellement, le site est recouvert de végétation et d’anciens arbres fruitiers. Les terres agricoles étaient cultivées jusqu’au Mas de Sahillà, situé en limite Sud du territoire communal. Elles appartenaient aux principales fortunes de Finestret, qui détenaient une part importante de biens immobiliers, mais également à certaines familles aisées de Joch comme la famille Molins. En effet, au XVIIIe siècle, la famille Paillarès détenait 4 journaux de vigne, 46 journaux à l’arrosage, 6 granges et 2 maisons. Le consul de Finestret Jacques Morer possédait 8 journaux de vignes, 60 journaux de bois et pacages ainsi que 6 granges et 3 maisons. Son beau-fils, Jaubert de Passà, hérita d’une grande partie de ses propriétés au XIXe siècle, qui détenait près d’un tiers des terres de Finestret [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLÉ, Revue d’Ille et d’Ailleurs, juillet 1990, p 35]. Suite au décès de ce dernier, les terres sont vendues à Joseph Vergès de Vinça et le Mas de Sahillà acquis par Justin Durand de Vinça en 1877. Au cours du XXe siècle, les champs sont convertis en vergers, notamment pour la culture de la pêche. Si l’agriculture est la principale activité du territoire, quelques corps de métier sont exercés dès le XVe siècle, comme l’illustre le capbreu de 1466, mentionnant un cordonnier, un tisserand et deux tailleurs d’habits. L’industrie locale est bien représentée au XXe siècle à Finestret, avec la présence d’une tuilerie. Si son emplacement est inconnu, l’écrivain Louis Codet en fait une description précise dans une nouvelle de 1902, appelée « Le Tuilier de Finestret » [BLAIZE, GIRMENS, PONSAILLÉ, Revue d’Ille et d’Ailleurs, juillet 1990, p 41]. La tuilerie était tenue par Paul Siret, par ailleurs maire de Finestret en 1936. Il s’agissait d’une « maison basse, prolongée par un hangar, que recouvrent des tuiles de rebut, biscornues et brûlées », construite par le tuilier lui-même. Les conditions de séchage de la brique sont également expliquées. En effet, l’auteur explique que « sous le hangar, des briques d’argile sèchent au vent, accotées l’une à l’autre. Un tamis et des cadres de bois s’accrochent à l’un des piliers ». La tuilerie devait certainement se situer dans les hauteurs de Finestret, puisque le tuilier descendait régulièrement dans le village pour exercer une autre profession, celle de barbier. Les activités économiques se diversifient au XXe siècle, avec la présence de deux cafés, d’une boulangerie, d’une boucherie, d’une cordonnerie et deux épiceries. Actuellement, il ne reste plus qu’une épicerie, uniquement ouverte le matin l’hiver et l’été.

Les aménagements hydrauliques

Le passage du canal du Rec Major dans Finestret depuis 1282 permettait d’irriguer les champs de culture, notamment les champs de céréales aux lieux-dits Les Closes et l’Alguer mais également d’alimenter en eau le village. Jaubert de Passa décrit le ruisseau en 1821 dans Mémoire sur les cours d’eau, où il explique qu’il prend sa source à Valmanya dans la vallée étroite de la Lentillà et que « c’est dans cette gorge, où il semble impossible de pénétrer sans risque, que la main de l’homme a dessiné, exécuté un canal d’arrosage » [François Jacques (baron). Mémoire sur les cours d’eau et les canaux d’arrosage des Pyrénées-Orientales. 1821, p 102]. Le second canal construit au XVIIIe siècle le long de la rivière de la Lentillà, le Rec del Molí, est également décrit par Jaubert de Passa dans son ouvrage. Il indique que « M. Morer (Jacques) conçut le premier l’entreprise hardie de placer un canal et de construire une digue »[François Jacques (baron). Mémoire sur les cours d’eau et les canaux d’arrosage des Pyrénées-Orientales. 1821, p 109]. Le canal était construit à même la roche, soutenu par des crampons de fer pour l’ancrage. L’entretien du canal et de la digue était à la charge du moulin à farine, tandis que celui de la dérivation pour les terres du village à la charge des habitants. Un pont-aqueduc, fut construit pour alimenter directement en eau le moulin depuis la rivière de la Lentillà. Il est par ailleurs indiqué sur le cadastre de 1831 sous le nom « Pont de Baou ». L’accès au canal depuis Finestret s’effectue actuellement à l’entrée du village depuis le GR10 menant à Baillestavy, en passant par des terrains agricoles privés. Il s’agit d’un ouvrage maçonné, renforcé depuis 2006 par un système de buses, qui protègent le canal des risques d’éboulis de pierres. Ces derniers sont en effet très fréquents, dû aux pentes très prononcées qui surplombent le canal. Des vannes en fer placées entre deux roches taillées permettent de réguler l’écoulement de l’eau. Elles sont généralement fermées en période hivernale et ouvertes dès les beaux jours. Un petit passage aménagé sous la roche du canal permettait l’écoulement de l’eau vers les jardins de Finestret. L’adaptation aux roches naturelles est visible à travers l’aménagement d’un premier tunnel en béton, sous lequel passe l’eau. Le caractère friable des roches présentes comme le schiste fragilise la structure, directement aménagée contre les parois rocheuses. En continuant plus loin apparait un pont-aqueduc métallique, probablement construit au XIXe siècle. Ce dernier qui permet le partage des eaux en deux, remplace un premier pont mentionné plus haut sur le cadastre de 1831. En effet, l’eau pouvait être dirigée vers le pont en direction du moulin ou continuer tout droit pour alimenter les terres agricoles. Il fut abandonné lors de la fermeture du moulin.

Matériaux de construction

Les matériaux employés pour la construction de l’habitat de Finestret sont directement issus des cours d’eau, comme le granit, visible sur les façades des habitations sous forme de joints plus ou moins grossiers. L’extérieur des parements devait probablement être enduit mais la plupart des maisons d’époque n’ont pas conservé ce type de finition. Certains avant-toits disposent d’une génoise à un rang afin de protéger les maçonneries de l’écoulement des eaux de pluie. Le principal matériau de couverture est la tuile canal, dont l’utilisation antique dans la plaine du Roussillon s’est largement répandue jusqu’au XXe siècle dans le Conflent. Dans l’habitat traditionnel, les ouvertures, généralement verticales, comportent parfois un linteau droit en bois, ainsi qu’un arc en plein cintre constitué de briques dites "cayrous". La modénature des baies de l’architecture bourgeoise se caractérise par la généralisation de l’arc surbaissé comme pour la maison Tixedor, même si le modèle de l’architecture rurale vernaculaire reste imprégné sur certains édifices. C’est le cas de la maison Ginestou dont les encadrements des baies de la façade arrière sont constitués de jambages et d’arcs segmentaires en briques, dites "cayrous".Si l’état intérieur du bâti de Finestret n’a pu être analysé lors du travail de terrain, il a été possible de photographies le vestibule d’entrée de la maison Morer, en cours de rénovation au n°2 Place Sainte-Colombe, ainsi que l’intérieur du rez-de-chaussée de la maison Ginestou. Ces espaces donnent un aperçu des méthodes de construction entre le XVIIe siècle et le XVIIIe siècle. L’entrée de la maison Morer a gardé son pavage d’origine de pierre roulée, dont l’allée centrale et les bas-côtés sont en opus spicatum. Cette disposition devait permettre le passage d’une voiture hippomobile. Un arc surbaissé en brique rouge constitue l’espace de transition entre le hall d’entrée et l’escalier qui permet d’accéder aux étages. Le sol du rez-de-chaussée de la maison Ginestou en terre battu permettait de fluidifier les mouvements du bétail et également de conserver une température basse, notamment pour la conservation des aliments dans la cave. La structure du plafond est restée intacte, avec un plafond composé d’un plancher bois à solives et la présence d’un poteau-poutre vertical dans une des pièces. Les planchers des étages étaient quant à eux être recouverts de carreaux aux motifs géométriques, comme en témoigne une photographie prise dans une pièce du premier étage en très mauvais état.

FORME URBAINE

Implantation du bâti

Le village de Finestret s’est développé linéairement, le long de la rive droite de la rivière de la Lentillà, et à flanc de colline au niveau du lieu-dit El Volo. Le bâti a la particularité de ne pas avoir été regroupé autour d’un élément défensif. En effet, Finestret disposait de la protection du château de Joch et de son seigneur. La rue du 19 Mars 1962 constitue une frontière entre l’habitat resserré au Sud, dont la trame médiévale est encore visible et le bâti aéré au Nord, remanié entre le XVIIe siècle et le XIXe siècle. En effet, la partie Sud de Finestret concentrait les principales activités commerciales, dont il ne reste aujourd’hui plus que l’épicerie au n°10 rue du 19 mars 1962. Cette dernière rue portait par ailleurs le nom de rue dels Marxans, en rapport avec la diversité des commerces en fonction jusqu’au XXe siècle. Au côté de la rue de la mairie, elle forme l’axe majeur de circulation dans le vieux centre, d’où partent des ruelles sans issues ou donnant accès à des jardins privés. Les habitations sont contiguës, mono-orientée sur rue et occupent la totalité des parcelles, comme l’illustre le cadastre de 1831. Si la plupart des parcelles sont étroites, certaines d’entre elles ont été regroupées dès le XVIIe siècle, comme l’atteste la maison Tixedor au n°7 rue du 19 Mars 1962, probablement construite à cette époque . Au niveau de la rue de la Mairie, le parcellaire résulte principalement d’un remaniement du XIXe siècle, avec une volumétrie du bâti plus importante.Au Nord, le bâti qui entoure directement l’église concentre les habitations des anciennes familles les plus fortunées de Finestret, dont la maison Morer au n°2 place de l’église, celle de la famille Noell au n°2 rue Saint Galdric, la maison Graule au n°2 rue de l’Hospice et la maison Ginestou au n°1 et n°3 rue del Graons. La maison Tixedor citée plus haut est également une demeure bourgeoise même si son emplacement est éloigné par rapport aux autres. Ces maisons de maître sont volontairement regroupées autour de l’église, lieu du pouvoir ecclésiastique et occupent de grandes parcelles (voir carte ci-dessous).Une grande partie des parcelles est occupée par des espaces verts, comme c’est le cas pour les maisons Graule et Ginestou. L’arrière des autres habitations présenté sur le cadastre napoléonien est constitué de jardins, dont la représentation rappelle celle des jardins à la française, marquée par la géométrie et la symétrie des formes.En comparant la trame urbaine actuelle de Finestret à celle illustrée dans le cadastre de 1830, il est intéressant de constater que la morphologie d’une grande partie du centre ancien a peu évolué. La partie basse située après le pont de la Lentillà absente du cadastre napoléonien a probablement commencé à se développer à la fin du XIXe siècle, avec l’aménagement de l’école (actuelle mairie). Les habitations qui entourent cette dernière sont visibles sur les photographies du XXe siècle . Cette partie de Finestret a continué à se développer dans les années 1970. Dans le haut de Finestret, deux habitations sont présentes sur le cadastre de 1830, dont l’une au niveau de l’ancien lieu-dit El-Christ et l’autre comprise dans un mas appartenant à François Jaubert de Passa. L’oratoire Sainte-Anne est visible sur l’habitation n°4 chemin du Christ, qui fut probablement un mas construit entre la fin du XIXe siècle et le début du XXe siècle. L’habitation est en effet absente du cadastre mais présente en 1953 , en face d’un second mas. Entre les années 1970 et 1980, des habitations sont construites le long du Chemin du Christ ainsi qu’au niveau du lieu-dit Las Cloués. La plupart des maisons situées en périphérie de Finestret datent des années 2000 et sont comprises dans des lotissements. Typologie de l’habitatLa maison villageoise de Finestret caractéristique de l’architecture roussillonnaise catalane, se décline en trois typologies distinctes. La première concerne la maison d’ouvrier formant une unité simple, avec deux travées de baies et un ordonnancement sur un ou deux niveaux. Ces habitations ont par la suite été remaniées entre le XIXe et le XXe siècle, avec le rajout d’une porte de garage au rez-de-chaussée, la mise en œuvre d’un enduit de façade et la reprise des baies, comme l’illustre la photographie ci-dessous. Le cortal est une remise agricole dont l’implantation s’est largement répandue dans tout le Conflent rural. Divisé en un ou deux niveaux, le rez-de-chaussée du cortal abrite les animaux et le stockage de la production agricole et l’étage le logement des paysans ou fermiers. Celui situé au n°22 de l’actuelle D25 et au n°2 rue du 19 Mars 1962 comprenant actuellement deux habitations séparées, constituait autrefois une seule unité. La structure des façades principale est similaire entre les cortals, avec une entrée comportant un linteau droit en bois, des ouvertures avec linteau droit ou cintré et encadrées de brique rouge. Contrairement à la première typologie décrite, la volumétrie de l’ensemble est importante avec une certaine homogénéisation des façades. Le dernier type d’habitat concerne la maison bourgeoise, principalement formée autour du XVIIe siècle. Les façades sont dans l’ensemble ordonnancées, dont la principale dispose d’une entrée principale avec une porte cochère. L’inclusion d’éléments architecturaux d’agrément comme le triplet en marbre de la maison n°7 rue du 19 Mars 1962 permet de distinguer la maison bourgeoise de la maison d’ouvrier.

Demeures bourgeoises

La population de Finestret entre le XIIe siècle et le XXe siècle et majoritairement composée d’ouvriers, qui vivent dans un habitat modeste. Quelques maisons bourgeoises se distinguent dans le village, notamment autour de l’église de Sainte-Colombe, comme évoqué ci-dessus. Elles appartiennent aux grandes familles du territoire, comme les Graule, Ginestou et Morer, dont la plupart ont été construites entre le XVIIe siècle et le XVIIIe siècle.

La famille Morer possédait deux grandes demeures, qui se distinguent par leur volumétrie. En effet, la façade principale de celle construite en 1628 au n°2 Place Sainte-Colombe, présente une composition symétrique et une horizontalité importante. Si la maison fut dévalisée à plusieurs reprises, l’aspect extérieur conserve des caractéristiques de l’architecture d’époque avec un ordonnancement de la façade bien marqué. L’entrée principale s’effectue par une porte cochère encadrée par de la pierre de taille, avec une clé de voûte en bas-relief. Les ouvertures à l’étage ont gardé leur volet bois d’origine, tout comme les appuis des fenêtres. Le dernier étage remanié laisse apparaitre un monogramme, qui représente une croix avec les lettres A et M entrecroisées. Il est probable que ces lettres fassent référence à l’union entre Ange Morer et Jean Armengau, ce dernier ayant réaménagé l’intérieur de la maison au XVIIe siècle. La seconde demeure située au n°7 rue de la Mairie et construite en 1738, présente une toute autre disposition, avec un corps de bâtiment plus massif que le précèdent. Cette typologie est renforcée par la terrasse du deuxième étage, qui créer une avancée par rapport à la façade principale. La demeure appartenait à la famille Morer, comme l’indique le monogramme gravé sur la façade.

Sur le même modèle que la maison de la place de l’église, celle de François Graule au n°2 rue de l’Hospici probablement construite au XVIIe siècle, présente des caractéristiques typiques de la maison bourgeoise du XVIIe siècle. Probablement construite au XVIIe siècle, la maison Ginestou reflète à la fois le modèle de l’habitat traditionnel de type vernaculaire, avec l’influence de l’architecture des cortals et de la demeure bourgeoise. Elle illustre en effet le statut social de son propriétaire, avec une porte d’entrée de type cochère, la terrasse en balustrade, ainsi que l’utilisation du marbre rose de Villefranche-de-Conflent pour les marches de l’escalier extérieur. La maison a la particularité de présenter une fonction d’habitation mais également agricole, avec les dépendances localisées au rez-de-chaussée. S’ouvrant toutes sur une cour interne, les pièces de la partie agricoles permettaient d’abriter les animaux et d’entreposer les denrées alimentaires. Une partie était habitée par le métayer, comme en témoigne la présence de deux latrines. L’espace agricole à proprement parler s’ouvre sur deux grandes pièces centrales, entourées d’un côté par une porcherie (vestige de mangeoire en granit) et de l’autre par une cave. L’intérieur de ces pièces est typique de l’architecture des granges roussillonnaises, avec un sol en terre battue et un plafond composé de solives et de poutres en bois. La charpente d’une des pièces dispose d’une poteau-poutre vertical en bois, dont le principal avantage est de permettre un aménagement de l’espace plus important. La cave est voûtée en plein cintre et devait certainement servir de glacière pour conserver les aliments. En effet, tous ses espaces sont directement situés sous l’habitation, et sont donc en partie enterrés.

Date(s) d'enquête : 2019; Date(s) de rédaction : 2019
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